Les origines de Celles

Bien entendu, il n'existe aucun document stipulant qu'à partir d'une certaine date, le village s'appellera Celles, pour telle ou telle raison. Dès lors, on en est réduit à faire certaines suppositions. Tout bon cellois vous dira que Celles tient son nom de grottes ou de cellules où vécurent jadis Saint-Hadelin et ses compagnons; c'est possible mais on ne peut pas être aussi affirmatif. Les plus anciens écrits citant le nom du village remontent au XIIème siècle: Cellae et Cellis, Cellez (1373) ou Celles à partir du XVème siècle. Plusieurs localités portent également ce nom; ainsi, en Belgique, outre Celles-lez-Dinant, on connait Celles-lez-Waremme et Celles-lez-Tournai. En France, on trouve Celles-sur-Plaine (Vosges), Celles-sur-Ource (Aube), Celles-sur-Belle (Deux-Sèvres), Celles-sur-Durolle (Puy de Dôme), Celles (Dordogne) en région aquitaine et Celles l'Hérault dans le languedoc. En Allemagne aussi: Celles (Basse-Saxe) et en Italie: Celle (Ligurie)

Sans aucun doute possible cependant, Celles tire ses origines du mot latin "cella".

Suivant différents auteurs, la signification du mot "cella" est un peu différente:

Dans Virgile et Catule, on le traduit par cellier, grenier

Chez Martial et Pétarque, il désigne une petite chambre, une cellule.

Cicéron et Plaute l'apparentent à l'intérieur d'un temple, d'un sanctuaire.

Dans le dictionnaire Larousse, on trouve les définitions suivantes:

Cella: - dans l'Antiquité, lieu du temple où est placée la statue du dieu, ordinairement isolé par une clôture.

  • désigne chaque compartiment dans un établissement de bains chez les romains.
  • dans les maisons particulières, toute pièce où l'on conservait quelque chose: grenier, cave et particulièrement cellier.

Celle: - droit féodal: maison et biens des personnes de condition serville.

  • histoire religieuse: petit monastère; (le mot "celles" entre d'ailleurs dans la composition de plusieurs noms de lieux où se trouvaient des cellules de moines)

Celles pourrait donc devoir son nom:

  1. Soit au temple paien contenant une "cella" consacrée au dieu Neptune, que le romains avaient érigée dans la localité lors de l'invasion des Gaules et pour laquelle un magnifique EX-VOTO est conservé dans l'église dans un endroit non accessible au public; une copie est visible à l'entrée de l'église.
  2. Soit aux établissements de bains que les romains avaient installés dans le site tout proche de Furfooz; de telles installations auraient pu exister à Celles également.
  3. Soit aux cellules habitées par Saint-Hadelin et ses disciples au VIIème siècle; à noter à propos de ces cellules qu'il ne s'agissait aucunement de grottes creusées dans le rocher; on était en effet très loin de l'âge des cavernes. Il est plus probable qu'il s'agissait tout simplement de petites habitations semblables à celles des paysans de l'époque: huttes sans étage, construites en bois et en argile.
  4. Soit au petit monastère construit par les successeurs de Saint-Hadelin.
  5. Soit aux greniers ou celliers où les moines, qui cultivaient la terre, entreposaient leurs récoltes.
  6. Soit aux groupes de maisons ou de biens des serfs dépendant du Seigneur de Vêves (de Celles), au temps de la féodalité.

Que faut-il en déduire ?

Rien d'absolument formel. Cependant, la supposition n°4 peut être rattachée à la supposition n°3, tandis que les suppositions n°2, 5 et 6 peuvent être écartées.

Nous accorderons alors la préférence à la supposition n°1, d'un point de vue historique et à la supposition n°3, comme tout bon cellois, d'un point de vue plus sentimental.

Ce qui est certain en tous cas, c'est que Celles fut de tout temps un centre important de pèlerinage, d'abord paien par le temple érigé par le romains et dédié à Neptune, et ensuite Chrétien, par l'arrivée de Saint-Hadelin et l'implantation de sa communauté.

Celles et Saint-Hadelin

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De famille noble et chrétienne, Saint-Hadelin est né en 617, en Aquitaine, contrée de l'ancienne Gaule, dans le bassin de la Garonne. Il sera l'un des premiers élèves de l'Abbaye des bénédictins, fondée en 631 à Solignac, près de Limoges, par Saint-Eloi qui allait devenir plus tard Evêque de Noyon puis de Tournai.

Saint-Remacle, originaire de la région, est mis à la tête de cette abbaye par Saint-Eloi en 637 avant de partir évangéliser l'Europe du Nord, accompagné par Saint-Hadelin. Ils passeront ainsi par Cugnon (Bouillon), Malmédy, Maastricht et Stavelot où Saint-Remacle est nommé évêque.

Avant de se séparer en 669, les deux se rendent en pèlerinage sur la tombe de Saint-Pierre à Rome où ils sont reçus par le Pape Saint-Vitalien. Sur le chemin du retour, ils se reposent à l'ombre d'un arbre. Le soleil vient alors darder de ses rayons le visage de Saint-Hadelin qui s'était endormi. C'est alors qu'une colombe vient étendre ses ailes au-dessus du visage d'Hadelin pour le garantir de la chaleur. Saint-Remacle voit également cette colombe, de même que quelques disciples qui les accompagnent. A son réveil, Hadelin déclare que le Saint-Esprit lui a parlé; il doit partir vers une contrée aux 4 collines, non loin d'une rivière, où l'on adore un dieu paien; c'est le signal de la séparation.

C'est alors qu'ils se quittent; Saint-Remacle rentre à Stavelot et Saint-Hadelin, accompagné par 2/3 disciples, chemine à la recherche de cette contrée. Après quelques jours de marche, il tombe sur un nommé Béon (le dinantais) à qui il demande l'hospitalité. Celui-ci lui fait quelques difficultés car sa femme est moribonde. Hadelin demande alors à la voir et lui rend subitement la santé. Béon se fait alors un devoir de lui donner un serviteur pour le conduire à travers la forêt à l'endroit qu'il cherche. Nous ne sommes plus qu'à 10km de Dinant; c'est ainsi que Saint-Hadelin arrive à Celles; c'était en 669.

Avec ses disciples, il s'installe dans une hutte et il vit d'une façon très austère. Bientôt le nom d'Hadelin, par les nombreux miracles qu'il accomplit, se manifeste dans les environs et parvient même à la Cour de Pépin de Herstal qui avait sa résidence à Jupille, près de Liège. Pépin et sa femme, Plectrude, viennent rendre visite au Saint et, désireux de pouvoir continuer à recevoir ses conseils et son enseignement, font construire une demeure non loin de là, à l'emplacement de l'actuel château féodal de Vêves. A l'époque, il s'agissait vraisemblablement d'une petite ferme, entourée d'une palissade et défendue par une tour en bois.

Saint-Hadelin décède à Celles, le 3ème jour avant les nones de février 690 (3  février). Ses disciples l'enterrent dans sa cellule.

Le 15 juin 704, son corps est placé dans une châsse assez vulgaire qui est placée dans la crypte de l'église, sous la tour ouest.

En 1046, transfert du corps dans une nouvelle châsse, magnifique oeuvre d'art offerte par le Seigneur de Celles et les paroissiens. C'est une des plus célèbres châsses du pays mosan, avec son Christ guerrier, vainqueur du mal, le manteau agrafé sur l'épaule droite, à la romaine. Sur l'autre pignon, on voit le Christ accompagné de Saint-Hadelin et de Saint-Remacle; on peut encore y admirer d'autres scènes de la vie de Saint-Hadelin (les miracles notamment: jaillissement d'une source à Franchimont, guérison d'une muette à Dinant, résurrection de Guiza ...)

En 1337, subissant les tracasseries des Seigneurs de Celles, les chanoines quittent le village avec la précieuse châsse vers Liège puis se fixent à Visé le 11 octobre 1338.

En 1413, on ouvrit la châsse pour en retirer les os de la tête et les enchasser dans un buste séparé.

Depuis 1338, la châsse de Saint-Hadelin n'a jamais réintégré Celles, à l'exception du mois d'août 1990 où elle fut exposée dans l'église durant une quinzaine de jours lors de grandes festivités organisées par l'asbl "Tourisme et Culture de Celles", à l'occasion du 1.300ème anniversaire de la mort du Saint. Il en aurait dû en être de même en août 2017 à l'occasion du 1.400ème anniversaire de sa naissance cette fois; hélas, nous n'avons pas trouver d'écho favorable à notre requête auprès des autorités visétoises.

Sans doute les dernières volontés d'Hadelin auraient été de ne jamais quitter l'endroit que Dieu lui avait désigné; l'Histoire en décida autrement et nous ne pouvons que remercier les habitants de Visé qui, voici plus de 6 siècles, prirent les restes du Saint sous leur protection et qui, depuis lors, traversèrent sans encombre, plusieurs périodes d'insécurité.

Notons quand même que la Paroisse de Celles possède plusieurs reliquaires qui sont exposés à la dévotion des fidèles chaque année lors de la procession et de l'office religieux du dimanche qui suit le 3 février, jour de la fête de Saint-Hadelin.

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Pour en savoir plus sur le village de Celles de la 2ème guerre mondiale (1945) à la fusion des communes (1976), n'hésitez pas à acquérir l'excellent livre "La mémoire des pierres", en vente au magasin Delhaize au prix de 20,00€.

 

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